JOYEUX ANNIVERSAIRE, CHARLES BAUDELAIRE
né le 9 avril 1821
Charles Baudelaire
La beauté
Je suis belle, ô mortels ! comme un rêve de pierre,
Et mon sein, où chacun s'est meurtri tour à tour,
Est fait pour inspirer au poète un amour
Éternel et muet ainsi que la matière.
Je trône dans l'azur comme un sphinx incompris ;
J'unis un coeur de neige à la blancheur des cygnes ;
Je hais le mouvement qui déplace les lignes,
Et jamais je ne pleure et jamais je ne ris.
Les poètes, devant mes grandes attitudes,
Que j'ai l'air d'emprunter aux plus fiers monuments,
Consumeront leurs jours en d'austères études ;
Car j'ai, pour fasciner ces dociles amants,
De purs miroirs qui font toutes choses plus belles :
Mes yeux, mes larges yeux aux clartés éternelles !
–Charles Baudelaire,
Les fleurs du mal (1857)
CHARLES PIERRE BAUDELAIRE se réjouirait qu'on ne le présente plus. Poète, critique culturel, traducteur littéraire, et artiste talentueux et discret, il est l'auteur de plusieurs essais sur la poésie et l'art, de traductions d’œuvres d’Edgar Allan Poe et Thomas de Quincey, et du célèbre recueil de poésie Les fleurs du mal (1857).
Chef-d'œuvre de modernisme–classique, romantique et symboliste à la fois–ce recueil de cent poèmes laisse une empreinte indélébile sur la littérature française (et peut-être mondiale).
Jugées obscènes, Les fleurs du mal subissent un procès retentissant dont leur auteur ne se remettra jamais totalement. Charles Baudelaire meurt dans la force de l’âge, ruiné, hémiplégique et génial, victime de la cancel-culture de son époque.
Les fleurs du mal seront réhabilitées un siècle plus tard, dix ans après la deuxième guerre mondiale.
Joyeux anniversaire, Charles, immortel probable.